Je ne suis pas une femme transgenre

Queer de Garbage

Je suis queer

Queer est un anglicisme signifiant étrange, bizarre, peu commun. Ce mot, initialement une insulte envers les personnes marginalisées de part leur identité ou leur orientation de genre, a été récupéré par la communauté qui en a fait une fierté.

C’est donc un terme politique, lié au sigle LGBT (d’ailleurs parfois complété par le Q de Queer), important car il désigne une oppression réelle des personnes ne se rattachant pas à la vision normée de la société.

Aujourd’hui, je dispose de moins de droits que d’autres individus en France parce que je ne rentre pas dans le carcan social et normalisé. Je ne peux pas avoir d’enfants par la PMA, j’ai plus de risques d’être discriminée dans le travail, les risques d’agression envers ma personne sont plus élevés que la norme, je peux être discriminée dans le milieu médical, sans parler du fait que je suis régulièrement mégenrée, ce qui représente une souffrance psychologique à laquelle je suis confrontée uniquement à cause de mon identité.

Je fais ainsi partie d’une catégorie de personnes opprimées et minorisées et, à ce titre, je combats le système en place. Les luttes pour les personnes LGBT et Queer me concernent directement.

Je suis donc queer.

Je ne suis pas queer

Au-delà du combat politique, être queer, cela signifie aussi faire partie d’une communauté. Les personnes Queer se sont souvent rassemblées, on se souvient de Stonewall ou des ballrooms de New-York. Aujourd’hui encore, beaucoup de personnes se regroupent, pour militer, mais pas que, et il existe une contre-culture queer et LGBT.

Cette contre-culture est importante, tout comme la communauté, qui accueille des personnes marginalisées et leur offre une place qu’autrement elles n’auraient pas. C’est un lieu d’accueil et d’écoute, et surtout, un lieu plus sûr.

Quand on risque de se faire agresser verbalement – voire physiquement – si on témoigne de l’intérêt pour une personne, c’est une source de pression et de danger. Dans un cadre queer, on peut vivre dans une relative sécurité ses aspirations romantiques ou sexuelles.

Comme toute contre-culture, des codes ont émergé, et si j’en comprends certains, j’avoue ne pas me sentir appelée plus que cela par ceux-ci. Je ne fais pas partie d’associations LGBT et si j’apprécie des personnes se revendiquant queer, je ne vais pas aller les chercher parce qu’elles sont queers. Je fréquente parfois des bars LGBT, mais rarement de moi-même.

J’ai fait la gay-pride, mais je ne me reconnais pas particulièrement dans une mouvance ou l’autre (il y en a beaucoup) de milieu queer. Au final, je le connais assez peu et je demeure assez perplexe face à son imagerie. Je suis une femme de rouge et de noir, et non d’arc-en-ciel.

Ainsi, d’un point de vue culturel, bien qu’ayant une sympathie pour les personnes affirmant cette identité, je ne suis pas queer.

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Un drapeau important pour le combat qu’il représente, mais auquel je ne m’identifie pas

Je suis une femme transgenre

De la même façon que les droits des personnes LGBT sont bafoués, les droits des personnes transgenres le sont. Toutes les décisions politiques concernant les personnes trans m’impactent directement, c’est indéniable.

Mes problématiques d’identité sont partagées par d’autres personnes trans et les luttes qu’il y a eu me sont vitales aujourd’hui. C’est parce que nous sommes dans les années 2020 que je peux jouir d’une relative liberté d’expression de genre en France, que je peux affirmer qui je suis, et tout cela, je le dois aux combats qu’ont mené des personnes transgenres avant moi.

La représentation des personnes transgenres m’a aussi beaucoup servi. Quand j’ai découvert Sense 8, il y a un peu moins de dix ans, cela m’a aidée à comprendre qui j’étais, et surtout que c’était possible.

Je revendique donc cet étendard et je l’affiche. Je participe à la visibilité des personnes trans par mes écrits ou par des interventions publiques, d’autant plus que je suis artiste et que j’ai une voix. C’est une responsabilité que j’endosse volontiers, pour que nos identités soient visibles, reconnues et légitimées.

Je suis donc une femme transgenre.

Je ne suis pas une femme transgenre

Pourtant, ce mot qui m’a un jour libérée est devenue une nouvelle étiquette, et les étiquettes enferment.

Il signifie que je suis différente des autres femmes, ni plus ni moins, et, si c’est vrai que mon expérience est marquée par cette transition sociale et médicale que j’ai effectuée, elle ne saurait me définir en tant qu’individu.

Une amie proche m’a exprimé qu’elle n’aimait pas être définie par le terme « cisgenre », néologisme qui désigne les personnes non-trans, et en en discutant, je me suis rendu compte qu’en effet, il créait une barrière entre nous.

Quand il y a 3 ans j’ai annoncé à mes proches que j’étais une femme, j’ai été immédiatement intégrée en tant que telle et il y a eu cette magnifique sororité autour de moi (et j’inclus dans cette sororité des hommes). Mon identité a été acceptée, encouragée, les barrières sont tombées.

Le mot cis, comme le mot trans, remettent des barrières entre les femmes qui ont été là pour moi et moi-même. Ces mots, que je trouve d’ailleurs fort laids, utilitaires (et la Romantique que je suis a en horreur l’utilitarisme), les marquent comme différentes de moi, alors qu’elles ont tout fait pour faire disparaître les différences.

Je comprends l’utilité de ces termes dans un contexte de lutte politique. Mais veux-je me définir par rapport à une différence, à un mot que je ne trouve même pas beau et qui me ramène perpétuellement à cette peau morte dont j’ai réussi à me défaire ?

Me clamer femme trans, c’est répéter qu’il y a deux sortes de femmes, et c’est faux. Je suis une femme, point.

J’ai donc décidé de trouver mes propres mots, au-moins dans la sphère privée. Certaines de mes amies sont des femmes de naissance, tandis que je suis une femme de renaissance. N’est-ce pas davantage poétique et élégant ? Moins américain aussi, car comme souvent, beaucoup de termes et de luttes nous proviennent d’Outre-Atlantique, tandis que je suis française.

Je suis beaucoup de choses : Femme, Artiste, Romantique, Féministe, Poétesse, Sorcière, Goth, Astrologue, Rebelle, Mageresse, Amie, Saphique (au sens premier), Metalleuse, Sage, Française, Cartomancienne, Snob, Désirante, Capricorne (mais pas que), Païenne, Enfant…

Mais ce que je ne suis pas, c’est une femme transgenre.

3 commentaires sur « Je ne suis pas une femme transgenre »

    1. Je suis contente si mon article te parle ! J’ai l’impression qu’il est plus universel que je l’aurais pensé !

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